Il est midi, les cloches de l’église égrainent les douze coups de midi …
Non, l’église est trop loin, on ne l’entend pas …
J’avance ma main droite pour prendre un verre …
Mais elle se referme toute seule, sans que je ne l’ai commandé, avant de saisir le verre avec un engourdissement de l’avant bras …
J’ouvre ma main … elle se referme à nouveau …
Je l’ouvre à nouveau … et là elle se referme encore, mais juste un peu …
Que m’arrive t il ?
C’est pas possible, ce n’est pas un …
Non, je parle normalement, je n’ai aucun autre signe, et puis cela ne peut pas m’arriver à moi, jamais malade, sans vrais facteurs de risque …
Pas à moi !!!
Mettre un certain temps pour se dire que cela pour être quand même …
Je trouve un rendez-vous en urgence, là, quasi de suite, chez un généraliste…(bel exploit quand même)
Et là la sentence tombe, inéluctable, véritable chape de plomb …
Je viens de faire, non je fais un accident vasculaire cérébral …
Je n’entends plus ce que le médecin me dit.
Tout tourne dans ma tête …
Je pense à des choses évidentes (prévenir mon épouse, comment me transporter à l’hôpital) et d’autres qui n’ont pas d’intérêt immédiat vue l’urgence (projets des mois qui viennent surement abandonnés, la déclaration d’impôt, les engagements pris cette semaine …et si cela s’aggrave … )
J’essaie de garder un certain contrôle, une certaine maitrise …
Mais non, je perds le contrôle de mon avant bras, des décisions … de ma vie
Je suis aux urgences
Allongé dans un box, interdiction de me lever, perfusion, scop, mesure tension artérielle tous les 1/4 d’heure, saturation …
L’interne des urgences ne m’a laissé évidemment aucune illusion
J’attends le scanner cérébral …
Mais je me rattache toujours à une autre possibilité, improbable, impossible …
Cela ne peut m’arriver, à moi …
L’attente semble interminable …
Les urgences accueillent toujours toute la misère du monde.
Me reviennent les deux années passées comme FFI en partie dans un service d’urgence.
Le personnel reste courtois et prévenant dans ce tournis de cris, de demandes …
Scanner
Retour dans un autre box
Attente
L’interne reviens accompagnée de l’infirmière s’occupant des prélèvements PCR …
Donc je reste …
Et j’admets enfin qu’il s’agit bien d’un accident vasculaire cérébral …
Premier test PCR (et oui, mes narines étaient « vierges » jusqu’à ce jour)
L’interne m’explique vraiment bien les choses, je pleure …
Encore un changement de box en attendant que la place se libère en soins intensifs de neurologie.
Mon avant bras droit est toujours un peu engourdi, je n’ai aucun déficit moteur.
Maintenant c’est l’interne de neurologie qui vient me voir, toujours bien explicative et prévenante.
Cette fois, je ne pleure pas.
Fibrinolyse
Attente
Enfin dans le service
Nouvel examen
Rappel de l’interdiction de se lever, juste droit au lit relevé à 20°.
Je n’ai plus aucune maitrise sur rien, l’accepter …
S’en suivent 3 jours où les examens complémentaires s’enchainent les uns après les autres, et toujours une gentillesse et une bienveillance admirables.
Le 3ème jour, le premier lever à été assez difficile … tout tourne.
Se faire accompagner jusqu’aux toilettes, jusqu’à la douche prise assis … pas facile à accepter …
Jeudi midi
Longue discussion avec le médecin qui prends son temps pour expliquer les résultats et la stratégie
Et là un deuxième coup de massue
Traitement anticoagulant
Je craque
On parle
Longue discussion le soir avec l’infirmière sur ce même sujet
Se rendre à l’évidence
C’est la stratégie la plus raisonnable
Je le sais … mais j’ai du mal à l’entendre
Quand pourrais je reprendre le vélo ?
Pourrais-je reprendre mes voyages ?
Aurais-je une vie quasi « normale » ?
On me dit que oui
J’en doute
Retour à la maison vendredi soir
La sensibilité est redevenue normale sur tout l’avant bras, sauf base du pouce et une partie de la paume de la main.
Je n’assume pas vraiment tout cela.
C’est trop, beaucoup trop d’un coup.
J’ai perdu le contrôle.
C’est beaucoup trop, en effet, trop, en trop peu de temps.
Je t’envoie toutes mes pensées.
Merci de ton attention
Oui c’est un peu (beaucoup) trop lourd d’un coup
Il m’a pris l’idée ce matin d’écrire cela, comme ça
Je ne sais pas si cela sert à quelque chose
Merci beaucoup de ton gentil mot
C’est bien écrit, ça sert forcément à quelque chose, à toi et à ceux qui te lisent. All the best!
Merci …
J’avais vraiment besoin de dire quelque chose, cela pèse un peu trop
Merci encore
Il y a de nombreuses années,vous avez accompagné ma première tentative de sevrage alcoolique avec une humanité et un pragmatisme rassurants.
Je souhaite que vous trouviez dans votre entourage un même niveau de professionalisme et d’attention qui vous permettra, à votre tour, de vous rétablir très vite et de profiter à nouveau de la vie !